(4 septembre 2019)
actualisé le 15 janvier 2020
Pour rappel le décret SMAD prévoit actuellement les obligations d'investissements suivantes pour les services de type Netflix : 15% du chiffre d'affaires dans les œuvres cinématographiques et audiovisuelles européennes et 12% dans les œuvres françaises. Netflix n'est pour le moment pas concerné par ce décret car non installé en France. Cela va changer avec la directive SMA que les nouveaux textes audiovisuels vont transposer. A ce titre, le Gouvernement a proposé de passer à 16% d'investissements (chiffre d'affaires hors TVA) pour un service de type Netflix et va même jusqu'à annoncer 25% en janvier. Cela impliquerait 80 millions d'investissements pour 500 millions de chiffre d'affaires (5 millions d'abonnés) avec un taux de 16% ou 125 millions pour 25%. Netflix vient d'annoncer 6.7 millions d'abonnés pour la France en janvier 2020. La facture serait alors aujourd'hui (mais cela augmentera mécaniquement avec la hausse du nombre d'abonnés) autour de 170 millions.
La question fondamentale est : 16% (ou 25%) à investir dans quoi ? Pour le moment le décret SMAD prévoit en son article 7 la chose suivante :
Notez que l'article 4 du décret prévoit la chose suivante pour déterminer la proportion des investissements devant aller dans les œuvres audiovisuelles d'une part et les œuvres cinématographiques (celles qui sortent en salles de cinéma en France) d'autre part :
Il va être intéressant de voir ce qui va être prévu dans la nouvelle version de ce décret SMAD. Si l'objet des investissements est maintenu, il faudra calculer quel pourcentage du catalogue Netflix est visionné en France en matière d’œuvres audiovisuelles et cinématographiques pour déterminer quel doit être la part d'investissement de Netflix entre ces deux types d’œuvres. Netflix évoquera probablement le secret des affaires. Pour le moment entre les achats de droits de diffusion et les investissements dans des productions, Netflix ne doit pas être loin des 16%. 25% demanderait un effort supplémentaire de la part de Netflix. Pour autant, y-a-t'il suffisamment d'investissements dans des œuvres cinématographiques françaises ? Au surplus, Netflix pourrait remplir ses obligations uniquement en achetant des droits de diffusion de films français existants. Dans ce cas, le cinéma français va faire la tête car l'idée est de financer le montage de films français avant qu'ils soient tournés.
Là est tout le problème : si le texte prévoit qu'une part importante doit être investie dans des œuvres françaises qui sortent en salles en France (ce qui sera logiquement une demande de la profession), cela voudra dire que Netflix devra investir dans des films qu'ils ne pourront diffuser que 36 mois après la sortie en salles. Netflix ne va pas aimer du tout, d'où le fait que Netflix parle déjà de modifier la chronologie des médias en conséquence. Cela promet de beaux débats !
Marc Le Roy
Docteur en droit
droitducinema.fr